C’est le dernier cri, la chose en vogue, le must des must, l’air du temps…C’est le street Art, le nouvel art des rues… interpellant nos ignorances avérées.
L’Algérie-qui a débaptisé la ville d’El Asnam en l’appelant Chlef par superstition ou parce que ça faisait païen- croule sous une incroyable statumania. C’est bronze sur pilier quand ce n’est pas régule sur marbre.
Ali la Pointe, Petit Omar, Hassiba ben Bouali, Mahmoud Bouhamidi, Amirouche, Abane Ramdane, Ben M’hidi ou quand la fonte des métaux vient à la rescousse d’une histoire non encore écrite mais dorénavant sculptée.
C’est la ruée vers…Leurre via une apologie « ferreuse » du sacrifice national.
Sauf qu’il se trouve que les statufiés ne soient pas toujours figés dans l’expression qu’on leur connaît en photo.
À Ain M’lila, ulcérés par la laideur de la statue de Larbi Ben M’hidi, les habitants ont décidé de la recouvrir du drapeau national et ont exigé son remplacement par une autre statue qui rendrait ses traits au héros de la Bataille d’Alger.
À Alger, un Ben Boulaid étriqué essaye en vain de ressembler à lui-même.
À quelques mètres de là, l’Emir Abdelkader, doyen des statufiés, s’accroche depuis des années, au licou de son cheval, pour ne pas se retrouver les quatre fers en l’air.
Immense et incroyable brocante, que cette nouvelle foire des statues et des stèles, qui fait basculer les APC (mairies) dans le Quattrocento !
Finis les embellissements du cadre de vie, la création de nouveaux espaces verts, le pari jamais tenu d’installer une bibliothèque dans chaque commune, l’introduction des pistes cyclables pour les 2 roues, la piétonisation de certains vieux quartiers, la création ( essentielle) de stations de taxi fixes. Fichtre que tout cela ! Sculptons et re-sculptons…Les Rodin et les Brancusi communaux sont au nombre de 13 à la douzaine.
Se ruant dans le foutraque, la mairie devient la tête de l’…Art d’un pays qui n’arrive même pas à faire fonctionner un cinéma !
Le Square Port Saïd, longtemps fermé pour travaux, est ceinturé par une haie de bustes d’artistes énervés. Keltoum, Bachtarzi, Medjoubi, Kouiret, Mustapha Kateb étouffent dans des clones insipides. Cela pourrait s’intituler : les fantômes de l’opéra !
Plus bas, à l’entrée du port d’Alger, un docker sur bronze, en saroual Kasbadji, toise, à quelques centimètres du niveau de la mer, le mouvement des semi-remorques qui le narguent, avec leur container dédouané sans documents ! C’est Alger sur sculpture mafieuse, qui s’achète une conduite artistique, après la faillite de tous les projets culturels !
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