«L’Algérie est incontournable pour la France, et la France l’est pour l’Algérie» a déclaré Abdelmajid Tebboune dans une longue interview au journal français l’Opinion. Va-t-on sortir cette phrase de son contexte ou la laisser dedans ? Quelle que soit l’option, les relations algéro-françaises sont toujours un Himalaya de difficultés à escalader. Dès qu’on essaie d’attaquer le moindre col, la cordée ne suit pas.
Relations passionnelles, pacte d’amitié, accord d’exceptions : l’envers des relations est toujours pavé de bonnes intentions… illusoires.
1830-1962…1962-2020 : cent trente deux ans de colonisation et cinquante huit ans de yoyo gaulois alternant promesses et impasses.
Giscard, Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Hollande privilégièrent tous, les effets d’annonce à de véritables relations avec l’Algérie.
Muqueuse à mille voix, la France se faisait toujours la spéléologue de son ancienne colonie.
Mitterand en 1983 enclencha la première impulsion de ce que devait être les relations entre les deux pays…indexation du prix du gaz algérien sur celui de son pétrole, régularisations des algériens vivant en France sans -papiers, visite de Chadli en France ( une première).
Puis l’abracadabrantesque Chirac venu découvrir Bab-el oued et son pathos, puis repartant fissa en promettant des relations d’exception… que flinguera la loi sur l’apport civilisateur de la colonisation en Algérie.
Sarko s’essaya au petit traité de l’insulte à Constantine en balayant d’un revers de main la repentance de la France pour ses crimes en Algérie.
Hollande, réduisait les relations à la pédanterie gauloise des mots qui ne veulent rien dire, et se figea dans l’alacrité de Boutef.
2017, la France élit un président né après la guerre d’Algerie. Jouant du violon avec un tabou vieux de 2 siècles, Macron déclare que la colo est un crime contre l’humanité. Ici et en France, on essaie de voir sous les replis de cette déclaration. Et tous la mettent sur la manie Balsacienne de Macron qui adore les mots qui percutent. Et puis encore rien, les relations retombent dans leur oisiveté habituelle.
Décembre 2019 , un nouveau président est élu en Algérie. Il s’exprime en français sans crayonner les ombres, il parle au téléphone avec Emmanuel Macron, disserte avec France 24, donne une interview à un canard français, les crânes des premiers résistants algériens à la conquête sont restitués.
La mémoire se désencombre. Quid des relations futures…mystère et boule de gomme. L’histoire ancienne et l’histoire future s’en mêlent ,elles interpellent les nombreux écueils…Circulation, importance de la communauté algérienne dans l’Hexagone, vie des étudiants algériens en France depuis toujours désavantagés, abrogation du 51/49.
Et maintenant…Ira-t-on vers le démantèlement de ce théâtre d’ombres dans lequel dansent toujours les fantômes de la colonisation ?
Ou persistera-t-on à faire croire aux algériens que les blessures de la colo, ne sont que de légères égratignures ?
La France qui dit souvent les chemins droits, a toujours emprunté des chemins tortueux…a dit un jour L. Sédar Sanghor. Tout est dit !