Il fallait être fou et entièrement convaincu de son droit pour décider de défier l’une des plus grandes puissances de l’histoire, sans moyens, presque sans argent et sans autre arme que le courage et l’intelligence. En coordination avec trois leaders historiques exilés, six jeunes algériens ont bravé les autorités coloniales françaises et leur armée, en déclenchant, le premier novembre 1954, la Guerre de libération nationale.
Il a fallu près huit ans de lutte, de sacrifices ; des centaines de milliers de morts, de torturés, d’éclopés, de déportés pour que le rêve de Larbi Ben M’hidi, Mustapha Ben Boulaïd, Didouche Mourad, Mohamed Boudiaf, Rabah Bitat et Krim Belkacem se réalise.
La révolution algérienne est, sans conteste, l’une des plus grandes de l’histoire humaine. Elle a été entamée par une poignée d’hommes, puis embrassée par tout un peuple qui vivait sous le joug d’une exploitation féroce et injuste.
La colonisation de peuplement a pratiquement chassé les enfants du pays de la terre de leurs ancêtres pour les remplacer par des Européens. Elle les a soumis au servage, à l’ignorance et au traitement raciste et a tenté de démolir les fondements de leur culture et de déchirer le tissu social qui les unissait depuis des siècles.
Tout au long de 130 ans d’occupation, les Algériens ont mené des soulèvements et des insurrections pour reprendre leur liberté et leur dignité, mais l’armée française les a réprimés avec barbarie.
Le dernier bain de sang a lieu le 8 mai 1945, le jour où l’Europe s’est émancipée de l’emprise nazie à l’issue d’un conflit dans lequel des dizaines de milliers de soldats algériens ont combattu côte à côte avec les alliés. Ce jour-là, des manifestants pacifiques sont sortis dans la rue, à Sétif, Kherrata, Guelma et ailleurs pour fêter la victoire et demander à la France de tenir sa promesse de leur accorder leur liberté.
En guise de réponse, quarante-cinq mille d’entre eux ont été massacrés à la mitrailleuse lourde et fauchés par des rafales sans discernement. La tragédie a fait prendre conscience aux nationalistes algériens qu’aucune négociation, hormis celle des armes, n’était plus concevable avec les occupants.
Neuf ans plus tard, ils sont passés à l’action et se sont engagés à ne revenir en arrière qu’une fois l’ogre abattu. La guerre était totale. Elle se déroulait dans les maquis, dans les villes et les villages, le désert et les frontières. En plus de la résistance armée, une bataille diplomatique héroïque et décisive opposait les dirigeants de la révolution à la puissante machine française.
Sur le terrain, des centaines de milliers de militaires ont été déployés sur le territoire pour «pacifier» l’Algérie. Mais ce dispositif infernal qui coûtait des sommes astronomiques à l’Etat français, n’a pas fait plier le peuple algérien et ses combattants de la liberté.
Ils n’ont rien épargné aux tenants de l’Algérie française : attentats, embuscades, accrochages, opérations de sabotage même en métropole, en parallèle à une guerre psychologique de tous les instants.
Le prix consenti a été très élevé, mais l’objectif de l’indépendance a été atteint et l’Algérie a fêté cette année ses soixante ans d’indépendance et de fierté.
Mohamed Badaoui