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Guerre russo-ukrainienne : le Monde arabe a suffisamment donné

Du Golfe persique à l’océan atlantique, les pays arabes ont subi plusieurs guerres tout au long du 20e siècle et depuis le début du 21e. Ces campagnes ont toutes été l’œuvre des Occidentaux. Il est logique que les peuples de la région offrent aujourd’hui leur sympathie à Moscou plutôt qu’à l’Otan.  

Quoi qu’on en dise, la guerre russo-ukrainienne est la première guerre moderne de civilisation et même de religion, bien qu’elle se déroule dans un contexte exclusivement chrétien. Dans l’un de ses premiers discours à son peuple, à la suite de l’attaque de l’armée russe contre son pays, le président Volodymyr Zelensky a, à plusieurs reprises, évoqué Dieu et parlé des églises qui ont été, selon lui, attaquées par les combattants du pays voisin. Il a aussi jeté le blâme sur le dirigeant du Kremlin qui, a-t-il laissé entendre, n’a pas respecté les liens de sang, de culture et de foi qui unissent en principe les peuples slaves.

Un reproche balayé du revers de la main par le tsar républicain qui a, à son tour, retourné l’accusation en affirmant sa volonté de «dénazifier» celle qu’on appelait jadis la «petite Russie». D’un côté comme de l’autre, on recourt aux symboles et aux valeurs ancestrales pour vilipender ceux qui en dévient.

Evidemment, ces discours font partie de l’arsenal de guerre. La propagande doit mobiliser les partisans et saper le moral de l’ennemi. On sait qu’en dessous de ce conflit de puissants intérêts géostratégiques s’agitent pour avancer leurs pions sur un échiquier où les joueurs connaissent les intentions, les forces et les faiblesses de l’adversaire bien avant le début de la partie.

C’est ainsi que les Occidentaux ont tout de suite sorti les adjectifs et les adverbes les plus saisissants pour qualifier l’ogre de Moscou qui s’est jeté de toute ses forces sur l’inoffensive Ukraine démocratique et pacifique mais qui était tout de même candidate pour renforcer les rangs de l’Otan.

Loin de ce théâtre sanglant, le Monde arabe observe avec acuité le déroulement des hostilités. Ses populations qui partagent, elles aussi, la langue, la religion et l’histoire se rappellent que plusieurs guerres d’Ukraine ont eu lieu sur leur sol depuis des décennies au nom de la civilisation et de la démocratie : Les guerres de colonisation d’abord, puis le partage des territoires, l’occupation de la Palestine, la guerre de Suez, la guerre d’Algérie, celle des six jours puis de 1973. Plus récemment, les guerres d’Irak menées par une coalition internationale, la guerre de Syrie, celle de Libye et du Yémen sans oublier la partition du Soudan…

Tout au long du vingtième siècle et depuis le début du vingt-et-unième, cette région a subi ce qu’aucune autre n’a subi. Il va donc sans dire que l’opinion populaire qui y prévaut a, dans une large proportion, offert sa sympathie à Vladimir Poutine et son armée surtout qu’on ne leur reproche aucune agression contre ce vaste ensemble humain. Il est vrai que son implication aux côtés et à la demande du président syrien Bachar El Assad est sujette à caution pour certains mais les Russes ont peu dérangé la quiétude des Arabes ou pris possession de leurs biens.

C’est, au contraire, eux qui se sont enrôlés dans la guérilla afghane contre l’ex-Union soviétique sous la bénédiction des Etats-Unis et de leurs alliés dans le Monde arabe. Il sera donc difficile pour l’Occident de convaincre un Irakien, un Syrien, un Libanais, un Libyen et encore moins un Palestinien de la justesse de la cause ukrainienne. Le pacte de confiance entre les Arabes et l’Occident est rompu depuis des années et même si des présidents et des monarques qui portent cette identité suivent les directives de Bruxelles et de Washington pour combattre la Russie, les petites gens ont déjà une idée précise sur les enjeux.

Mohamed Badaoui

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