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Algérie-France : les raisons d’un rendez-vous raté

C’est avec des pointes d’humour et des tacles à peine dissimulés que le président de la République a commenté le sur-place qui affecte les relations entre l’Algérie et la France. Un style qui cache mal son agacement face à l’attitude ambivalente de Paris.

C’est avec un langage franc et direct qu’Abdelmadjid Tebboune a parlé de l’état des relations algéro-françaises qui passent depuis plusieurs années par des moments d’incompréhension, parfois de tensions, entrecoupés par de courts épisodes de détente.

Symptôme de cette évolution en dents de scie, le report à plusieurs reprises de la visite que doit effectuer le chef de l’Etat à Paris. De nombreuses hypothèses ont été avancées par les analystes pour expliquer le renvoi sine die de son voyage, mais aucune d’elles n’a paru tenir la route.

Tebboune vient de donner, sur un ton cash, les raisons de cette valse de retrouvailles maintes fois annoncées et autant de fois décommandées. Même s’il a affirmé que son déplacement en France est maintenu, il a estimé, avec une pointe d’humour noir, peu diplomatique, qu’il n’entend aller en villégiature, mais pour un but précis. «Une visite d’État a ses exigences», a-t-il dit lors de sa dernière rencontre avec la presse. «Elle doit être couronnée de résultats tangibles, ce ne sera pas une visite touristique».

Il a ensuite défini le cadre pour sa réussite en s’appuyant sur l’exemple de ses visites d’État qu’il a effectuées en Russie, en Chine, en Italie et au Portugal. «Pour la France, je ne partirai pas pour défiler dans les champs Élysées avec la cavalerie de la Garde républicaine», a-t-il fait savoir. «J’irai pour renforcer les relations entre les deux pays, ouvrir de nouvelles pages et fermer d’autres anciennes, et non pas pour annuler ceci ou cela».

Inutile de revenir sur les nombreuses querelles diplomatiques ou médiatiques qui ont opposé les deux pays ces derniers temps, en particulier depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Elysée. Ces obstacles sont, cependant, surmontables au regard des relations passionnelles qui caractérisent les deux partenaires surtout en ce qui concernent les questions mémorielles. Au fond, ce que l’Algérie officielle et populaire reproche à la France, c’est le paternalisme que veulent maintenir, coûte que coûte, certains cercles nostalgiques de la colonisation. Cette vision, de plus en plus décomplexée, s’exprime à longueur de journée dans les colonnes de journaux, sur les plateaux de télévisions et de radio ainsi que dans les discours politiques.

Où en est-on du «partenariat renouvelé» ?

A croire que, même après avoir arraché son indépendance par les armes, le sang et la souffrance, l’Algérie est toujours sous tutelle de l’ancien occupant. Une attitude qui insupporte l’écrasante majorité des Algériens, y compris ceux qui vivent sur le sol français.

Aujourd’hui, ils sont occupés à améliorer leur quotidien, à développer leur potentiel et espèrent voir leur pays prendre son essor. Ils cherchent donc des partenaires susceptibles de les inspirer et les stimuler pour atteindre ces objectifs, non à devenir l’arrière-cour d’une puissance en déclin prise en tenaille entre la guerre en Ukraine, le joug américain et une situation socio-politique interne des plus explosives.

Lors de sa dernière visite en Algérie, le président Macron avait parlé avec enthousiasme d’un «partenariat renouvelé». Il était question de jeter les fondations d’une nouvelle ère où les clivages idéologiques ou conjoncturels n’empêchaient pas une coopération qui profiteraient aux deux parties. Une année plus tard, son gouvernement n’arrive même pas à établir, selon Tebboune, le programme du président de la République algérienne.

La classe politique semble totalement inconsciente des enjeux au sud de la Méditerranée et en Afrique. Il est dès lors normal que plusieurs Etats que la France contrôlait quasi directement, à l’instar du Mali, du Burkina Faso, de la Centrafrique et, depuis une semaine, le Niger, aient voulu s’émanciper de cette pesante charge.

L’Algérie, dont le caractère a été forgé par une grande Guerre de libération, puis par le non-alignement durant la Guerre Froide, la lutte contre le néocolonialisme et l’attachement viscéral à la souveraineté est encore plus intransigeante sur tout ce qui touche sa fierté et à ses intérêts.

Ali Younsi-Massi   

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