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116e vendredi de contestation : Les hirakistes d’Alger changent de stratégie

On les attendait à Didouche Mourad, mais les manifestants ont décidé à la dernière minute de bouder l’artère centrale de la capitale et investir le boulevard Hassiba « pour déjouer les calculs des policiers ».

Depuis le déclenchement du Hirak, le 22 février 2019, c’est la première fois que la rue Didouche Mourad n’a pas été le théâtre de manifestations dont le flux a été cette fois-ci détourné vers la Boulevard Hassiba Ben Bouali.

Au début, on croyait que les forces de l’ordre avaient interdit l’accès à la principale artère du pays en bloquant la marche au niveau de la montée de la Grande poste où d’habitude les vagues venant de Bab El Oued et de Belcourt faisaient jonction pour investir le centre-ville en passant par la rue Docteur Sâadane. Toutefois, les témoignages de hirakistes ont remis en cause cette version en affirmant que ce sont les meneurs de la procession qui ont décidé de jouer un tour pendable aux forces de l’ordre.

D’après la même source, cette « contre-stratégie » avait pour but de semer le trouble dans les calculs de la Direction générale de la Sûreté nationale. « Les jeunes ne voulaient pas tomber dans le piège de la semaine dernière et se faire bastonner par les flics. Ils ont décidé de changer de parcours pour les déstabiliser ».

Lors de la marche du vendredi dernier, les éléments de la brigade anti-émeute sont même allés au contact des protestataires pour les disperser à coups de matraque. Ils ont également embarqué plusieurs activistes pour les emmener aux commissariats avant de relâcher la majorité d’entre eux. Cette réaction avait pour objectif de réduire la pression sur les agents qui subissaient non seulement la chaleur sous un équipement lourd mais aussi la faim, la soif et le manque de sommeil lors de cette journée du ramadan.

Deux jours plus tard, ils ont réprimé de manière forte le mouvement des pompiers qui sont sortis dans la rue réclamer l’amélioration de leurs conditions socioprofessionnelles. Le mardi d’après, durant la marche hebdomadaire des étudiants, la police a procédé à de nombreuses arrestations musclées et au matraquage de dizaines de manifestants.

Il semble bien que les autorités sont, elles aussi, en train de changer de stratégie ou, pour le moins, d’attitude envers le mouvement populaire qui prend de plus en plus une consonance sociale sous l’effet de la crise économique qui touche le pays.

Ces derniers jours, l’éditorial d’El Djeich, l’organe central de l’Armée populaire nationale et le gouvernement d’Abdelaziz Djerad ont l’un après l’autre accusé des milieux qu’ils n’ont pas clairement désignés d’instrumentaliser les revendications sociales pour déstabiliser le pays.

On assiste également à un durcissement des mesures prises contre les activistes ou tous ceux qui expriment des opinions jugées subversives par les autorités. Ainsi, l’ex-député de Médéa Tahar Missoum a été condamné avant-hier à deux ans de prison ferme pour « atteinte à la personne du président de la République » et d’« incitation à attroupement non armé» entre autres.

Le sémillant parlementaire, connu sous le sobriquet de « Spécifique », est célèbre pour ses critiques au vitriol qu’il adresse depuis les années 2010 aux ministres et au personnel politique en général. Il avait posté, cette semaine, sur les réseaux sociaux une vidéo jugée offensante au président Abdelmadjid Tebboune. Quelques jours plus tôt, c’est l’opposante Amira Bouraoui qui a écopé d’une peine de quatre ans de prison mais sans mandat de dépôt pour à peu près les même charges.

Mohamed Badaoui

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