Le risque d’une menace sur la sécurité alimentaire a convaincu les autorités et la population d’un retour rapide et en force vers l’essentiel : bien se nourrir avec des produits algériens.
Son prix défraie actuellement la chronique. L’oignon coûte aujourd’hui presque aussi cher que des pommes et d’autres fruits. Jadis considéré comme le symbole de la banalité et du manque de raffinement gastronomique, le bulbe s’est négocié hier aux alentours de 200 dinars, 250 à certains endroits.
Il est vrai que la saison de la récolte n’a pas encore sonné, tandis que la consommation a connu un pic à l’occasion du ramadan puisque l’oignon est un indispensable à la cuisine nationale. Toutefois, l’effet grossissant du tubercule laisse penser que la situation alimentaire en Algérie connaît une forte dégradation. Or même si la demande a décuplé pendant la première semaine du mois sacré, force est de constater que le marché demeure plus ou moins contrôlé.
Hormis les viandes, le poisson et les fruits qui restent inaccessibles à la majorité, les cours des légumes continuent d’osciller dans une fourchette raisonnable en prenant compte de la conjoncture mondiale.
La plupart des produits agricoles de saison sont à la portée des petites bourses, dépassant rarement les 100 dinars par kilo. Une famille végétarienne de quatre personnes peut se tirer d’affaire en dépensant moins de mille dinars par jour.
L’ennui est que le couffin n’est pas le seul poste budgétaire à pourvoir. Les ménages doivent faire face à plusieurs autres nécessités en même temps. Résultat : un salaire moyen est loin d’être suffisant pour rester à flot.
Les choses auraient été encore plus graves si l’Etat n’avait pas lourdement investi dès le début des années 2000 dans le secteur primaire. Les différents programmes d’aide au secteur ont fini par réaliser un seuil plus qu’acceptable de suffisance en matière de production agraire.
Cette politique a réussi à faire évoluer la superficie agricole utile (SAU) de 7, 5 millions d’hectares en 1989 à 8,59 millions d’hectares en 2021. Les terres mises en valeur au cours de ces dernières décennies, et réellement mises en culture ont atteint près de 350 000 hectares.
L’irrigation a également fait un bond en avant. Les parcelles irriguées ont été multipliées par quatre pour atteindre une surface de 1,4 millions d’hectares en 2021. De 44 barrages en 1990 pouvant contenir 3,3 milliards de m3, le pays a augmenté ses capacités à près de 85 barrages en 2021 avec un potentiel mobilisable de plus de 12 milliards de m3.
Le problème de l’agriculture algérienne ne se situe pas tant dans la production (à l’exception de la filière céréalière qui dépend largement de l’importation) mais relève des circuits de distribution. Le secteur est contrôlé par des réseaux qui parfois agissent artificiellement sur les cours et parfois organisent volontairement des pénuries pour augmenter leur marges.
Les autorités ont cependant adopté une législation extrêmement sévère contre les spéculateurs ce qui a permis d’atténuer quelque peu le choc en ce mois de ramadan.
Mourad Fergad