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Migration clandestine en Méditerranée : l’Europe face à sa responsabilité

Quelques siècles après sa grande expansion coloniale, l’Europe occidentale subit aujourd’hui le retour du boomerang sous la forme d’une migration venue du Sud dont elle cherche à se prémunir en se fermant sur elle-même.

Giorgia Meloni, la passionaria de l’extrême-droite romaine devenue aujourd’hui chef du italien doit son pouvoir à une partie de la population hostile à la migration venue du sud de la Méditerranée et d’Afrique subsaharienne. Elle a d’ailleurs mené en 2022 sa campagne législative sous le thème de “stopper les débarquements”.

La première dame d’Italie est connue pour son franc-parler et son esprit polémiste qui l’oppose souvent à ses partenaires de l’Union européenne sur la question. En 2019, elle a violemment critiqué la France qu’elle a accusée d’organiser un pillage systématique des ressources ce qui a conduit les habitants appauvris de ce continent de vouloir s’installer dans le vieux continent.

Selon elle, l’émigration est due à des entreprises françaises qui volent les richesses de l’Afrique et poussent ainsi ses enfants à partir. Elle a mis à l’index le franc CFA qui est, a-t-elle dit, “la monnaie coloniale que la France imprime pour 14 nations africaines, à laquelle elle applique le seigneuriage et en vertu de laquelle elle exploite les ressources de ces nations”.

L’Italie qui a été, quoique brièvement, un État colonisateur de la Libye et de l’Ethiopie mais aussi une grande pourvoyeuse de migrants dans toutes les régions du monde, sait que le déplacement des populations ne se fait pas sans raison. C’est pourquoi, elle cherche aujourd’hui une solution globale pour freiner la saignée démographique de l’Afrique et la submersion de l’Europe par un apport humain qu’elle rejette.   

Giorgia Meloni a donc reçu hier les dirigeants du pourtour méditerranéen en vue d’asseoir un nouveau mode de coopération entre pays de départ et les pays d’arrivée. Elle propose, à cette fin, de s’inspirer de l’accord signé par l’UE avec la Tunisie. Elle résumé cette stratégie par ces mots : “Lutte contre l’immigration illégale, gestion des flux légaux d’immigration, soutien aux réfugiés, et surtout, la chose la plus importante, sinon tout ce que nous ferons sera insuffisant, une large coopération pour soutenir le développement de l’Afrique, et particulièrement des pays de provenance”.

100.000 migrants arrivés en Europe au premier semestre 2023

Selon Rome, quelque 80.000 personnes ont traversé la Méditerranée et sont arrivées sur les côtes de la péninsule depuis le début de l’année, contre 33.000 l’an dernier sur la même période, en majorité au départ du littoral tunisien.

Les chiffres de l’Onu indiquent, pour leur part, que plus de 100.000 migrants sont arrivés en Europe au cours des six premiers mois de 2023 par la mer, depuis les côtes nord-africaines, la Turquie et le Liban. Ils étaient un peu plus de 189.000 en 2022.

Face à l’urgence, Bruxelles et Rome ont signé la semaine dernière avec le président tunisien un protocole d’accord qui prévoit notamment une aide européenne de 105 millions d’euros destinée à empêcher les départs de bateaux de migrants et à lutter contre les passeurs.

En d’autres termes, l’UE veut déplacer le contrôle de ses frontières à l’Afrique du nord en contrepartie de montants, en somme, dérisoires pour les pays qui veulent collaborer à cette politique. L’Union cherche maintenant à étendre le concept à l’Egypte et au Maroc.

A aucun moment, cependant, une sorte de Plan Marshall pour aider l’Afrique à se développer et fixer ainsi ses populations sur leur terre natale n’a été évoquée. Pourtant, c’est l’intervention occidentale menée par la France de Nicolas Sarkozy contre la Libye pour destituer feu Mouammar Gueddafi qui a ouvert la Boîte de Pandore de la migration clandestine en Méditerranée.   

Évidemment, les défenseurs des droits des migrants sont mécontents de la démarche européenne. Sea-Watch déplore que “l’UE et ses Etats-membres continuent de durcir leurs politiques mortelles d’isolement” tandis que Human Rights Watch estime que “l’Europe n’a rien appris de sa complicité dans les abus atroces commis à l’encontre des migrants en Libye”.

En un mot, la question migratoire en Méditerranée est si complexe qu’un simple sommet est incapable de la résoudre.

Ali Younsi-Massi 

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