La petite pique lancée par Abdelmadjid Tebboune à son gouvernement, le jour de son retour en Allemagne pour reprendre les soins, a semble-t-il claqué comme un fouet. Cette harangue qui a été suivie, juste après, par le limogeage brutal du ministre du Transport et du Président directeur général de la compagnie Air Algérie n’est pas restée sans effet.
On assiste ces derniers jours à un branle-bas de combat ou les principaux responsables du pays adoptent un étonnant langage de vérité et de mises au point musclées entre hommes et même entre institutions.
Cela a commencé par le coup de sang d’Abdelaziz Djerad et du sermon dont il a gratifié son équipe à propos de la mauvaise qualité des projets textes législatifs qu’ils produisent. Quelques jours plus tard, nous avons assisté à une avalanche de remplacements des directeurs de l’Education nationale alors que l’année scolaire ne fait que commencer. Peu après, le ministre de l’Enseignement supérieur a, d’un mot, démoli la crédibilité du système LMD, adopté depuis des années par l’Université algérienne.
Ce mardi, le chef du gouvernement est revenu à la charge en s’attaquant cette fois-ci à un gros morceau : les Douanes algériennes. Lors de la grandiose cérémonie de célébration de la Journée internationale de la douane organisée au Centre international des conférences Abdelatif Rahal, il n’a pas hésité a appeler ce corps à « participer davantage à l’effort soutenu de l’Etat en matière de lutte contre la corruption », laissant presque entendre qu’il ne coopérait pas suffisamment avec sa tutelle sur cette question sensible.
Il a également sommé l’institution d’ « encourager les investissements générateurs de richesse et de postes d’emploi » et d’« accompagner la relance économique », notamment par « la valorisation des ressources humaines » et « la modernisation des modes de gestion » et la lutte contre la bureaucratie. Autrement dit, par la compétence et par la transparence. Il a en outre mis les douaniers devant l’obligation d’adopter une éthique professionnelle « exemplaire » à travers « le strict respect des valeurs mondiales en la matière énoncées dans la Déclaration d’Arusha de l’Organisation mondiale des Douanes ».
Tout ce mouvement qui secoue l’Exécutif est également à lier avec la récente sortie du président du Conseil national économique et social, Réda Tir, qui a affirmé que « son institution a récupéré son autonomie » vis-à-vis de l’Exécutif et « participera à l’évaluation des politiques publiques ».
Quoi qu’il en soit, l’agitation des dernières semaines prouve que le gouvernement commence à subir la pression intenable d’une conjoncture où se conjuguent le reliquat de deux décennies de gabegie, d’une année d’ébullition populaire et d’une panne générale due à la pandémie mondiale. Les autorités du pays se savent d’autre part sous l’observation critique des partenaires et des adversaires. Ils doivent démontrer qu’ils tiennent d’une main ferme et experte le gouvernail du pays pour ne pas susciter les convoitises et le manque de respect.
Sur le plan interne, les derniers développements renseignent clairement sur le degré des rapports de force qui tendent la scène politique et qui provoqueront à coup sûr de nouveaux chamboulements très prochainement.
Mohamed Badaoui