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Xavier De Driencourt (Ex-ambassadeur de France) : les déboires de la diplomatie française en Algérie


Par Abed Charef

L’ancien ambassadeur de France à Alger, Xavier De Driencourt, a publié, samedi 7 janvier, une tribune sur le site du journal le Figaro, dans laquelle il annonce que l’Algérie va s’effondrer, et que cela pourrait provoquer, par ricochet, un effondrement de la France.
Le texte de Mr Driencourt présente la situation en Algérie comme particulièrement grave. Selon lui, l’Algérie s’effondre. Rien de moins.
En fait, ce texte révèle comment une partie de la France officielle voit l’Algérie, un regard qui n’est pas partagé par une autre partie de l’establishment français.
En poste à Alger au moment du hirak, Mr Driencourt avait fait de nombreuses déclarations à l’époque. Son texte de cette semaine confirme qui il considérait comme ennemis à l’époque (en gros, l’armée et l’appareil sécuritaire), et à contrario, qui étaient ses amis. On lit, à travers les lignes, comment la diplomatie française a tenté de gérer le hirak, car de ce point de vue, l’Algérie est toujours considérée par la France comme une question interne.

Aveuglement

Mr Driencourt reproduit par ailleurs une analyse décalée, étonnante à ce niveau. Pour lui, en Algérie, militaires et islamistes, c’est la même chose.
Une telle erreur d’appréciation explique, de manière plus large, les déboires de la diplomatie française en Afrique. La France a été chassée du Mali, du Burkina, de Centrafrique, et risque de perdre beaucoup de terrain en Afrique durant la prochaine décennie.
Emmanuel Macron a fait preuve de plus de discernement, malgré une certaine inconstance. Il eut un éclair de lucidité, pas dans ses déclarations odieuses d’octobre 2021, mais quand il a qualifié le colonialisme de crimes contre l’humanité.La France institutionnelle traditionnelle ne le lui a pas pardonné.


Pour l’Algérie, ce type de pamphlet émanant d’un représentant d’un courant politique considéré comme hostile est dans l’ordre des choses. Il explique, à posteriori, l’attitude ambiguë de la France, les hésitations au moment du hirak et l’hostilité qui a suivi.
Par contre, pour un regard algérien, constater qu’un projet national algérien démocratique peine à se mettre en place est plus difficile à admettre. Car même si la matrice du pouvoir algérien actuel reste dans une ligne nationale, forcément considérée comme hostile par une France traditionnelle, elle reste dans les tâtonnements, et n’apparaît pas comme la plus lumineuse possible.

Nouvelle matrice

Ceci dit, L’Algérie et la France peuvent-elles faire mieux ? Évidemment. A une condition.
Cela doit se faire dans le cadre d’une nouvelle matrice, qui tienne compte du réel.
Avec cette donnée incontournable : l’Algérie atteint un seuil (démographique, économique, géographique, géopolitique) qui en fait un pôle nouveau. Dans ce nouveau siècle, la moitié nord de l’Afrique va s’agréger autour de deux grands pôles, l’Algérie et l’Égypte.


C’est une donnée concrète.
Cette évolution donne à l’Algérie un rôle de partenaire, non un rôle de relais ou de sous-traitant.
L’Algérie tente, avec ses moyens, de mettre en place cette nouvelle matrice. Y compris en commettant des erreurs en interne, en matière de gouvernance et de respect des libertés notamment.
Mais une partie de la France officielle y est hostile, où n’arrive même pas à l’admettre. C’est ce qu’exprime le texte de Mr driencourt.
Pour finir, il serait erroné de considérer les propos de Mr driencourt comme de simples velléités d’un nostalgique d’une autre Algérie. Le poste d’ambassadeur de France en Algérie a un poids important dans le dispositif institutionnel français : les deux autres ambassadeurs récemment passés par Alger, Bernard Emié et Bernard Bajolet, ont fini à la tête des services de renseignements français !

A.C

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