L’impact de la pandémie de Covid-19 sur l’économie mondiale sera “prolongé” au vu de la nécessité de maintenir les mesures de prévention face à l’absence d’un vaccin efficace contre le virus, a estimé mardi le médecin et chercheur algérien établi aux Etats-Unis, Elias Zerhouni.
“Il n’y a pas aujourd’hui de vaccin ou de contre-mesure efficace et il est très peu probable qu’il y ait un vaccin dans l’année qui vient. Il faut donc compter au moins une année à une année et demi de réponses qui ne peuvent pas arrêter la pandémie directement”, a expliqué le Pr Zerhouni lors d’une téléconférence organisée par le Conseil national économique et social (CNES).
Ainsi, l’impact économique ne va pas s’arrêter “du jour au lendemain”, selon le Pr Zerhouni, appelant à planifier la reprise économique d’une manière progressive.
Selon lui, trois scénarios sont projetés par la communauté scientifique: un scénario en “V” soit une chute brutale et une reprise brutale, un scénario en “U” avec une chute brutale et une reprise progressive, à partir du début 2021, en un cycle, et autre scénario en “W” qui prévoit une chute brutale et une reprise grâce à l’effet de l’été mais une rechute en octobre/novembre puis une reprise sur toute l’année 2021.
Sur ce point, il a expliqué que la chaleur de l’été devrait diminuer la propagation du coronavirus: “On n’est pas sure de l’impact de l’été, mais nous pensons qu’il va y avoir une régression pendant cette saison”.
Dans tous les cas, “la reprise économique ne sera pas rapide”, affirme le Pr Zerhouni qui préconise, par ailleurs, des réponses adaptées pour chaque pays en fonction de sa réalité.
“La pandémie est devenue mondiale mais qui connait des évolutions différentes dans les différents pays, il faut donc ajuster sa stratégie économique et sociale en fonction de ces évolutions selon le contexte national”, a-t-il souligné.
Dans ce cadre, il a relevé la spécificité du modèle suédois qui impose une quarantaine aux personnes âgées et atteintes d’une maladie chronique et maintenir l’activité économique pour le reste de la population à condition de respecter les mesures de prévention.
Ce modèle est conditionné par un taux de 85 à 90% de guérison parmi les personnes qui ont contracté le virus, note le Pr Zerhouni, expliquant que cette solution d'”immunité générale” permet de limiter sensiblement les pertes économiques et un fort recul du PIB.
Par ailleurs, il a mis l’accent sur l’importance de tirer profit de la conjoncture actuelle de crise sanitaire pour attirer les capitaux étrangers afin d’engager des investissements en Algérie.
“Il est clair qu’il est plus facile de mobiliser des fonds maintenant que dans deux ans (..) il faut donc échelonner les besoins financier de la reprise économique et ça doit être discuté à long terme”, soutient le Pr Zerhouni précisant qu’il ne s’agit pas d’un endettement extérieur destiné à la consommation interne mais des crédits pour investissement dans des projets rentables.
Evoquant l’impact de la pandémie sur les systèmes de santé, le chercheur a estimé que le secteur de la recherche va subir des années de “vaches maigres” en raison des difficultés financières qui vont également avoir leurs impacts sur les possibilités d’améliorer les capacités du système.
Cependant, la pandémie va permettre de renforcer l’idée de création d’un organisme qui développera un système de surveillance , de prévention et de préparation à ce type de maladie, en assurant la coordination entre les pays du monde et la collecte en temps réel des données locales.
Le Pr Zerhouni a estimé que le développement de ce système de surveillance est très nécessaire puisque “il est clair que nous allons avoir de plus en plus de pandémies, vu les échanges croissants entre le monde humain et celui animal et la fracture de la séparation environnementale entre les deux mondes”.
Interrogé sur la possibilité de développer des virus dans des laboratoires, le Pr Zerhouni a assuré que ce type de procédé existe effectivement à travers la synthèse de l’ADN, notamment pour tester des nouveaux traitements, mais il a souligné, toutefois, que le coronavirus était “clairement” naturel et non pas artificiel.