« Restituer le parcours d’un militant penseur, organisateur, diplomate et fin stratège en cette circonstance est un exercice hardi. Résumer tant d’événements et de tournants historiques qu’il a impactés et traversés l’est plus. Il a eu un parcours de combat exceptionnel et a joué un rôle multidimensionnel », c’est ces termes que l’ancien chef du gouvernement Mouloud Hamrouche évoque le parcours de hocine Aït Ahmed
Pour Hamrouche, Ait Ahmed est théoricien de la guerre populaire révolutionnaire, combattant et chef de l’Organisation secrète (l’OS), représentant et porte-parole du Mouvement nationaliste à l’extérieur FLN/ALN, il se révélera à cette occasion un fin diplomate, un expert hors pair des rapports mondiaux ». Selon lui « la patrie lui doit deux œuvres monumentales qui ont marqué le cours de l’histoire de la renaissance de l’Algérie ». La première est « son rapport au comité central à l’occasion du congrès de Zeddine », en 1948, qui débouchera sur la création de l’Organisation secrète (OS). La seconde est « son étude envoyée de prison au Comité de coordination et d’exécution (CCE) né du Congrès de la Soummam pour la formation du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) ».
Aït Ahmed, dira l’ancien chef du gouvernement « conseilla de transcender tout clivage tribal ou régionaliste en donnant un caractère national et institutionnel aux volontés et aux discours que les nationalistes développaient ». Aït Ahmed avait en effet écrit: «Dans cette phase, la notion de l’Etat au niveau international est plus pertinente que les notions de liberté et d’indépendance.» C’est ce qui a permis d’afficher que la souveraineté nationale réside en dernier ressort dans le peuple et pas uniquement dans des structures légales reconnues, selon la lecture que fait Hamrouche et d’ajouter « l’Etat a été reconnu à partir de septembre 1958 avec la formation du GPRA par le Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA).Faut-il ici, maintenant et à cette occasion, convoquer l’histoire d’un combat. Pas toute l’histoire, mais quelques moments forts ».
Les pères fondateurs du nationalisme algérien, lit-on dans le document signé par Mouloud Hamrouche était très clairs dés le début « L’Etat algérien sera un Etat démocratique ou il ne survivra pas »….c’est le verdict des initiateurs de la renaissance du pays.
Il a été la réponse adéquate à la question de la colonisation de peuplement et à la négation identitaire, écrit-il. Hamrouche affirme que cet acte fondateur, « qui a débuté avec le rapport d’Aït Ahmed au congrès de Zeddine, conforté par la création de l’OS et concrétisé ensuite par la création du FLN/ALN, a été plus qu’une guerre pour le recouvrement de notre indépendance et notre liberté ». Il a été, dira-t-il « aussi pour notre identité, pour la souveraineté du peuple et de la libre pratique religieuse…ce projet ambitionnait que les Algériens gouvernent librement leur pays ». Combien parmi nous savent ou se souviennent que nous n’avions pas d’identité nationale ni de nationalité, s’interroge-t-il. « Nous n’avions pas le droit d’accéder au statut de citoyen, car notre territoire a été spolié. Nous étions candidats à l’extinction ».
C’est grâce à la vigilance des pères fondateurs, à leur intelligence et à leur capacité de mobilisation et d’organisation que notre peuple a pu renaître et recouvrer son identité et sa nationalité. De ce fait, des Algériens accèdent aujourd’hui à d’autres nationalités. En cultivant l’oubli et en instrumentalisant l’histoire afin de justifier et légitimer l’exercice du pouvoir, nos héros de cette épopée ont été lynchés et tribalisés. L’épanouissement de notre identité est malmené. L’édification de notre Etat national, protecteur de tous les droits et de toutes les libertés, est retardée.
C’est cette même vigilance qui avait dicté le retour de Si El Hocine au pays, en 1989, et qui « a été à la fois un espoir retrouvé et une contribution à l’ouverture politique. Il avait estimé que la Constitution du 23 février 1989 allait réenclencher le processus de refondation de l’Etat algérien démocratique et social ». Ce retour a été pour lui, écrit Hamrouche « l’occasion de rencontrer, de nouveau, l’Algérie de ses rêves, de retrouver l’esprit qui était le sien et celui de ses anciens compagnons du PPA, de l’OS et du FLN/ALN.