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Les alertes sur une nouvelle crise financière planétaire se multiplient : l’économie algérienne à l’épreuve d’un cataclysme annoncé

Plusieurs analystes mettent en garde ces derniers mois contre le péril de l’effondrement des places financières. Endettement public effréné dans les économies avancées, multiplication des bulles spéculatives qui risquent à tout moment d’éclater, développement des crypto-monnaies et incertitudes font planer sur le monde de sombres perspectives. Pendant ce temps, l’Algérie peine à diversifier ses sources de revenu et sortir ainsi de sa dépendance aux hydrocarbures. 

De nombreux indicateurs annoncent la possibilité d’un krach financier dans les prochaines années voire dans les mois à venir. La récession en cours des économies avancées, en même temps que le grossissement de leur dette publique, alimente les craintes de certains analystes. Ceux-ci ne cessent de multiplier les alertes et les mises en garde contre un effondrement historique des marchés.

De plus, l’économie mondiale ne s’est pas encore rétablie du recours massif à la planche à billets (appelée timidement « quantative easing » ou financement non conventionnel) pour sauver le système bancaire de la faillite, à la suite de la crise des subprimes en 2008. Combinés au gonflement de plusieurs bulles spéculatives sur les places boursières, ces éléments augurent de sombres perspectives.

Tout se passe comme si nous allions assister à un cataclysme plus violent que celui d’il y a 13 ans lorsque de gigantesques institutions financières se sont écroulées comme de fragiles châteaux de cartes tandis que d’autres, à l’instar de Merrill Lynch ou AIG, ont été sauvées in extremis de la faillite par l’intervention des Etats. Ces derniers ont alors créé un genre de « fausse monnaie » pour renflouer ces mastodontes qu’on qualifiait la veille seulement de « to big to fail (trop gros pour couler) ».

Toutefois, les mesures prises à la suite de la catastrophe des crédits hypothécaires n’ont pas servi à freiner l’appétit des requins de la finance. Leur voracité risque de plonger le monde dans une nouvelle mésaventure qui sera, semble-t-il, la plus dévastatrice de l’histoire.

L’américain Michael Burry, le génie de la finance qui avait empoché près d’un milliard de dollars en misant sur l’éclatement de la bulle immobilière de 2008, a récemment averti qu’un remake du scénario des supbrimes était en préparation. Il a déjà prédit la chute rapide de la valeur de Tesla, la marque d’Elon Musk, l’homme le plus fortuné, qui est capable d’entraîner dans son mouvement descendant un grand nombre de victimes.

Un drame sur le point de se produire

On peut ajouter à ce risque l’envolée des crypto-monnaies, dont le célèbre Bitcoin qui a vu sa valeur tripler en moins d’un an et pour atteindre en janvier dernier près de 50 mille dollars. Les risques sont donc multiples et variés ces temps-ci. Personne ne sait cependant par quel vecteur le drame se produira. Mais il est certain qu’il se produira.

L’Algérie est, à priori, protégée d’une exposition directe à la déflagration. Très peu endettée vis-à-vis de l’étranger (moins de 2 milliards de dollars), son économie n’est pas organiquement liée au système financier mondial. Elle possède certes une bourse mais celle-ci tient plus du « centre culturel » où l’on apprend les rudiments de l’art du trading que de la place où s’échangent les titres à la vitesse de la lumière. Ses banques publiques sont dominantes mais leur politique de crédit demeure très pusillanime. Elles n’opèrent pas non plus sur les marchés extérieurs sauf pour les opérations ordinaires en majorité liées à l’importation.

En outre, le dinar n’est pas convertible et sa valeur n’a pas attendu une quelconque crise planétaire pour se réduire comme une peau de chagrin. Les dernières cotations de la banque d’Algérie montrent que son cours ne cesse de dégringoler et, à ce rythme, il ne tardera pas à équivaloir celui pratiqué au marché noir.

En matière de production de biens réels, l’agriculture algérienne réalise de bonnes performances et arrive à satisfaire les besoins du marché à des prix plus ou moins abordables. Le pays demeure, cela dit, dépendant des importations à coup de centaines de millions de dollars par an pour ce qui est du blé, du lait et d’autres matières de première nécessité. La pénurie de l’huile de table est là pour montrer la précarité de son système d’approvisionnement qui est soumis aux caprices du marché international des intrants et des matières premières.

L’industrie dans un état maladif

L’industrie algérienne hors hydrocarbures, pour sa part, n’arrive pas à sortir de son état maladif qui dure depuis des décennies. Sa contribution au Produit intérieur brut continue d’être insignifiante et sa capacité d’exportation négligeable.

Le pétrole et le gaz ainsi que la transformation de certains produits pétrochimiques sont les seules sources de devises de l’Algérie. Cette malédiction se perpétue depuis plus d’un demi-siècle et l’empêche de développer d’autres secteurs, ne serait-ce que dans le domaine minier.

Le coût d’extraction du Sahara Blend, le pétrole algérien, est parmi les plus bas du monde (environ 25 dollars le baril). Ses caractéristiques -viscosité et faible teneur en soufre- en font une denrée appréciée par les raffineries qui le transforment aisément en essence de voiture et en kérozène. La proximité du marché européen lui donne également un atout concurrentiel.

Concernant le gaz, l’Algérie possède une carte avantageuse avec des pipelines qui déversent directement en Europe et des méthaniers qui n’ont que la Méditerranée à traverser pour livrer leur cargaison.

Malgré ces avantages, l’économie algérienne n’arrive pas à diversifier son offre sur les marchés extérieurs ni attirer des investissements directs étrangers. Car le pays demeure englué dans une bureaucratie étouffante, caractérisé par une instabilité juridique (les lois changent en fonction des dirigeants et des conjonctures) et perverti par la mentalité rentière qui a favorisé la corruption et l’opacité dans la gestion.

Aujourd’hui en récession, affaibli par la chute de ses recettes extérieures et par l’instabilité politique depuis plus de deux ans, le plus grand pays d’Afrique peine à valoriser ses richesses. Il sera encore plus vulnérable en cas d’une nouvelle crise économique mondiale si la demande sur les hydrocarbures connaît un autre rétrécissement.

 Avec plus de 40 millions d’habitants, une dépense publique plus importante que ses ressources et un climat qui ne favorise pas l’entreprenariat, l’exportation et la création d’emplois, l’Algérie mettrait le genou à terre dans l’hypothèse d’une baisse à long terme des cours pétroliers et gaziers. Cela dit, l’épreuve qu’elle traverse peut constituer une opportunité pour repenser de fond en comble sa stratégie de développement en vue de la fonder sur la valorisation du travail, de l’effort, de l’innovation et de l’utilisation rationnelle de ses ressources, en premier lieu, humaines. Certains pays, dont la Russie, l’ont fait pour se relever d’une situation encore plus délétère.

Mohamed Badaoui

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