Depuis des mois, les Algériens subissent des coupures intempestives de l’alimentation en eau. Ce stress n’est malheureusement que le début d’une situation qui pourrait s’aggraver dans les années à venir si des solutions intelligentes ne sont pas rapidement trouvées.
En plus de l’angoisse provoquée par l’épidémie du Covid-19, la population algérienne renoue cette année avec la pénurie de l’eau potable. Les robinets sont à sec pendant plusieurs heures et provoquent incompréhension et colère chez les citoyens.
Pour Mustapha Kamel Mihoubi, ministre des Ressources en eau, il suffit de réduire le gaspillage de cette matière vitale en s’attaquant aux fuites et aux branchements illégaux qui déversent 45% des ressources dans la nature au lieu qu’ils soient captés par les canalisations.
Venant du premier responsable du secteur, cette explication paraît pour le moins étonnante. Le problème de la distribution de l’eau potable en Algérie est vieux de plusieurs décennies. Il s’agit d’une situation structurelle qui risque de s’aggraver comme le montrent certains symptômes avant-coureurs. Récemment, en effet, les prémices d’émeutes de la soif ont été enregistrées dans une localité de la wilaya de Msila.
Ce n’est un secret pour personne : L’Algérie compte parmi les pays les plus déficitaires en eau. Son territoire est à 90% désertique et sa bande côtière est surpeuplée du fait de la concentration des activités au Nord. Sa pluviométrie varie de 12 à 1600 millimètres par an, avec de fortes disparités entre les régions.
Le pays ne dispose que de rares cours et d’étendues d’eau douce qui sont pour la plupart pollués. Depuis l’indépendance, la construction de barrages n’a pas constitué une priorité des gouvernements successifs. Ce ratage s’est répercuté négativement sur le bien-être des habitants qui ont été soumis pendant longtemps à la rareté de l’eau. Il a également privé l’agriculture du liquide nourricier empêchant ainsi son développement.
Résultat, l’Algérie est classée parmi les 17 pays les plus pauvres en potentiel hydrique, avec plus ou moins 500 m3 par habitant d’eau renouvelable. Elle est par ailleurs titulaire d’une autre mauvaise performance en réalisant moins de 50% du seuil de rareté fixé par la Banque Mondiale, à savoir 1000 m3 annuels par habitant et moins de 33% du seuil de confort hydrique qui se situe entre 1000 et 1700 m3 par habitant. La moyenne mondiale s’élevait, elle, à 6700 m3 vingt ans plus tôt.
Les potentialités hydriques de l’Algérie sont, pourtant, estimées à plus de 17 milliards m3 par an. Dans le Nord, elles avoisinent 12 milliards de m3 renouvelables, dont 2 milliards en eau souterraine. Dans la zone Sud, les réserves sont de l’ordre de 5 milliards de mètres cubes répartis entre deux grandes nappes souterraines.
C’est l’agriculture qui consomme près de 70% de l’eau disponible au pays. Mais l’accroissement démographique exerce également une pression constante les ressources exploitables évaluées à quelques 8 milliards de m3.
Dans les années à venir, la demande va certainement exploser et mettre l’Algérie dans une situation peu enviable si les autorités ne placent pas ce dossier en haut des priorités. Dans tous les cas, le réchauffement climatique et l’avancée du désert vont bientôt obliger gouvernants et gouvernés à changer leur rapport à l’environnement et particulièrement à l’eau.
Pour l’instant, la solution palliative des centrales de dessalement de l’eau de mer adoptée depuis une décennie paraît insuffisante pour mettre à l’abri le pays d’une grave pénurie d’eau. Selon le ministre des Ressources en eau, l’Etat a décidé de faire passer leur nombre de 11 à 20 d’ici 2030. Ces stations seront réservées à la production de l’eau à boire tandis que les barrages, qui sont au nombre de 80 actuellement, seront destinés à couvrir les besoins de l’agriculture.
Mohamed Badaoui
Pourquoi pas dès maintenant penser à l’exploitation de la nappe albienne ? Les grands projets se planifient et ne sont pas lancés dans la précipitation.
On dit eau potable et non à boire. c’est pas la mer à boire.