Accueil / En vrac / Par Anouar El Andaloussi : la bureaucratie et l’informel, un mariage consanguin : que peut faire le numérique ?

Par Anouar El Andaloussi : la bureaucratie et l’informel, un mariage consanguin : que peut faire le numérique ?

La bureaucratie n’est pas nécessairement un modèle mauvais, c’est tout le contraire, si l’on se réfère à Max Weber qui fait du modèle bureaucratique « un idéal type ». Ce sont les comportements discrétionnaires des fonctionnaires dans ce modèle qui sont devenus néfastes, coûteux et pervers pour le rôle de l’administration dans la vie économique et sociale. Quand le modèle bureaucratique n’est pas bien élaboré et qui laissent émerger des comportements déviants, apparaissent alors les défauts de la bureaucratie et cette dernière devient une notion péjorative. On traite le mauvais fonctionnaire de bureaucrate.   Autrement dit la bureaucratie devient péjorative et improductive lorsqu’elle s’érige en système de pouvoir au lieu et place de sa mission : instrument de l’Etat. Distinguons alors deux situations : bureaucratie, instrument de l’Etat et bureaucratie, instrument de et du pouvoir. Dans le premier cas, nous sommes dans l’Idéal – Type Wébérien et dont la traduction empirique est l’administration allemande, autrichienne, suisse ou même dans une variante moins efficace, nous sommes dans la tradition administrative latine dont la traduction empirique se trouve dans les modèles centralisés d’administration dans le monde latin (France, Italie, …) et dans le monde soviétique (URSS et démocratie populaire avant la transition, mais dont les survivances sont toujours présentes). Une autre variante de ce dernier modèle se trouve dans l’héritage de la colonisation dans les colonies françaises d’Afrique qui aujourd’hui s’autonomise du modèle Français pour s’érige en système puissant régissant les sociétés et les économies de ces pays, car disposant de pouvoirs formels importants qui donnent naissance à des pouvoirs discrétionnaires colossaux aux fonctionnaires, et ce sont ces pouvoirs discrétionnaires qui créent les phénomènes bureaucratiques (pouvoirs des bureaux).

En Afrique, comme en Algérie, nous avons le double héritage : colonial et soviétique, c’est dire que l’administration est un instrument de pouvoir et du pouvoir.

L’administration formelle doit être impersonnelle, c’est-à-dire neutre devant les usagers, alors que les zones non formalisées, non codifiées, donnent des pouvoirs discrétionnaires aux fonctionnaires qui seront par la suite source de négociation, de retard, de corruption, d’arbitraire, etc….

Le numérique est au secours des usagers pour rétablir et même renforcer l’Impersonnalisation des relations administration –administrés (usagers). Il est vrai aussi que la numérisation accélère les processus décisionnels, augmente la transparence, simplifie les procédures, élimine, réduit les distances physiques et d’autres avantages encore.

Mais la numérisation, comme d’ailleurs la règle juridique, est le produit de l’homme et celui-ci peut contourner et même détourner la règle de droit pour en faire un instrument de négociation, de marchandage,… Il ferait la même chose avec la numérisation : une panne par ci, une erreur par-là, une signature, une copie conforme…Finalement la numérisation, en ce qui concerne le service public, tout comme la norme administrative, ne peut être efficace que dans le cadre d’un système à la fois techniquement puissant et conduit par une administration professionnelle et des fonctionnaires irréprochables sur le plan de l’éthique et de la morale professionnelles.  

Les activités informelles s’accommodent de ce système laissant une grande place à la négociation. Elles entretiennent ce système et lui réservent une part de ses revenus pour combattre la transparence et toutes les formes de normes ou de règles y compris celles dites morales.

On peut former des techniciens et acheter de belles machines, mais il est très difficile d’inculquer les valeurs éthiques et morales et le sens des responsabilités à des agents évoluant dans une société qui fait de ces valeurs un achalandage mais jamais une pratique. Alors réformons et modernisons l’administration ou la société toute entière ? UN CHANTIER IMMENSE ET VASTE.    

A propos LA NATION

Voir Aussi

Par Anouar El Andaloussi : l’Afrique : longtemps ignorée, aujourd’hui adulée, courtisée !!!!

Dans une précédente chronique (en septembre 2023), nous avions écrit ceci : « Les enjeux géopolitiques et …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *