Le ministre du travail a avancé un taux sur le travail des enfants qui ne semble pas refléter la réalité car beaucoup d’entre eux travaillent, de manière occasionnelle ou permanente, pour aider leur famille.
Seulement 0,001% des enfants algériens travaillent, a déclaré le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Fayçal Bentaleb, citant «les opérations périodiques de contrôle effectuées lors du premier semestre 2023».
Or, de visu, dans tout le pays, ce sont plusieurs milliers d’enfants qui exercent une activité lucrative de manière régulière ou occasionnelle. On les voit, aux abords des routes, dans les marchés, à l’intérieur des cités, vendre du pain, des légumes ou d’autres marchandises. Beaucoup d’entre eux ont également trouvé le moyen de mendier non pas en tendant la main mais en présentant des mouchoirs en papier.
Dans les trains de banlieues, dans les gares, dans les stations d’autobus et de taxis au long cours, ils sont nombreux à vendre de l’eau en bouteille, des friandises et des cigarettes.
Depuis quelque temps, dans certains quartiers, des adolescentes se sont mises à confectionner des parures de pacotilles pour les proposer aux passants. Il est vrai que si l’on se réfère aux statistiques officielles, en principe, aucun jeune de moins de seize ans (l’âge de la fin de l’instruction obligatoire) ne travaille. Cela dit, la déperdition scolaire est importante et déverse chaque année des cohortes d’oisifs sans qualification académique ou professionnelle.
Ainsi, plus de 500 mille personnes se trouvant dans ce cas, parmi eux des adolescents et des préadolescents, échappent aux radars des services concernés puisqu’ils ne cherchent même pas un travail et se complaisent dans cette situation.
Désœuvrés, pour certains, ils font partie de ce qu’on appelle le «Halo du chômage», un groupe formé d’inactifs mais qui ne demandent plus d’emploi. Ces individus commencent à se débrouiller tôt dans la vie. Plus tard, ils ne demanderont pas un poste et continueront à vivoter.
Cette armée d’inoccupés, livrée à elle-même se fait exploiter par le secteur informel ou, pis, se dirige vers la délinquance. Certains sont recrutés dès leur jeune âge par les réseaux de trafic de drogue pour écouler leur poison dans les quartiers.
Toutefois, la plupart des enfants sont employés par leurs propres familles pour participer à améliorer les rentrées du foyer. Même en étant scolarisés, ils profitent de leur temps libre pour mettre la main à la pâte.
Aussi, la déclaration du ministre du Travail est en partie vraie. Contrairement à d’autres pays, d’Asie, d’Amérique latine et d’Afrique, il n’existe pas en Algérie des ateliers où des enfants sont exploités par des patrons véreux. Cependant, ils ne sont pas rares les petits algériens qui participent à leur manière à l’économie parallèle.
A l’occasion de la Journée mondiale de la lutte contre le travail des enfants, Fayçal Bentaleb a certes voulu rassurer l’opinion à l’intérieur et à l’extérieur du pays, mais les chiffres qu’il a produits reflètent partiellement la réalité. Et, si la situation économique des ménages se dégrade davantage, un nombre plus important d’enfants préféreront gagner de l’argent pour s’en sortir que de profiter des joies de l’enfance.
Mohamed Badaoui