En prévision du Ramadhan, un branle-bas de combat a lieu en ce moment pour garantir l’approvisionnement régulier du marché en matière de lait subventionné. Ce produit sensible peut créer des tensions, en cas de pénurie.
Par un réflexe quasi-pavlovien, les Algériens forment, illico presto, une queue dès qu’ils voient un arrivage de lait dans une épicerie. A quatre sachets par tête de pipe, le lot est vite écoulé au grand désarroi des retardataires. Plusieurs bagarres et même un meurtre ont eu lieu lors de ses rassemblements où, souvent, les clients jouent du coude pour s’approvisionner. Cet aliment de base, subventionné depuis toujours par l’Etat, crée d’ailleurs automatiquement une tension dès que les quantités distribuées sur le marché diminuent. A 25 dinars le litre, il constitue une source de protéines animales pour ceux, majoritaires dans la population, qui ne peuvent pas s’offrir la viande et, encore moins, le poisson.
Le lait, ainsi que le pain, ont un prix politique garant de la paix sociale. Même l’huile de table qui vient parfois à manquer ne suscite pas autant de panique en cas de pénurie. Il est dès lors normal que le gouvernement s’inquiète de la moindre perturbation dans ce domaine. A l’approche du ramadhan, aucune erreur n’est permise.
Au début du mois, le directeur général de la Compagnie nationale algérienne de navigation, Smain Abdelmalek, s’est substitué au ministre du Commerce pour annoncer le débarquement sur les principaux ports algériens d’une quantité de 4.000 tonnes de poudre de lait. Pas moins de 160 conteneurs, en provenance de Pologne et de Belgique, ont été ainsi déchargés à Alger, Oran et Annaba en attendant les 20 autres qui devraient être réceptionnés ces jours-ci.
Un communiqué de CMA-CGM a précisé que la «sensibilité et l’importance de la marchandise a nécessité la mobilisation de moyens humains et matériels exceptionnels pour réussir à la transporter dans les meilleures conditions, depuis la Pologne vers l’Algérie».
Hier, c’était au tour du ministère du Commerce de révéler qu’une nouvelle carte de distribution du lait subventionné était en cours d’élaboration en coordination avec le ministère de l’Agriculture pour un meilleur approvisionnement du marché en cette matière, a indiqué un responsable du ministère.
Ahmed Mokrani, directeur de l’organisation des marchés et des activités commerciales, a précisé que le nouveau dispositif regroupera le plus grand nombre de communes, en particulier celles situées dans les zones d’ombre. Près de 400 communes sont dans ce cas. Elles se trouvent toutes dans les zones défavorisées, ce qui contraint les cadres du Commerce et de l’Agriculture à tenir un marathon de réunions pour remédier à cette situation.
En prévision du mois du Ramadhan qui connaît habituellement des perturbations de la chaîne de distribution du liquide nourricier, 5.000 tonnes supplémentaires de poudre de lait vont être acheminées vers 119 laiteries (104 privées et 15 de Giplait) par l’Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (Onil). L’organisme injecte mensuellement dans le circuit 14.79 tonnes, une quantité qui permet la production de 141.543.689 litres de lait soit une moyenne de 4.7 millions de litres par jour.
Selon des chiffres avancés par l’Onil en 2018, l’Algérien ingère 145 litres par an, alors que, la moyenne mondiale fixée par la FAO est de 90 litres par an per capita. Ce sont donc 55 litres annuels de plus que les autres terriens.
Par ailleurs, le DG de l’ONIL avait indiqué que le volume global engloutit par l’ensemble des Algériens dont le nombre était, à cette date, de 40 millions environ est de 5 milliards de litres, dont 3.5 milliards de litres produits localement. Le coût des 200 000 tonnes de poudre de lait importées par l’Office s’élevait alors à 400 millions de dollars. La liste des fournisseurs est restreinte où la Hollande et l’Uruguay occupent le haut du pavé.
Sachez, enfin, que le lait est formé à environ 88% d’eau et un fois lyophilisé ce taux tombe à 3 %, mais il conserve, cependant, les protéines, des sels minéraux et les matières grasses du lait. Avec un kilo de poudre, on obtient plus de 7 kilos de lait reconstitué.
Mohamed Badaoui