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Par Anouar El Andaloussi : l’Agriculture algérienne malade de sa gouvernance.

S’il y a un secteur qui fait débat en Algérie de manière récurrente et souvent polémique en raison de l’importance de son impact sur la vie de toute la société, c’est bien l’agriculture.  L’agriculture algérienne emploie plus de deux millions de travailleurs, elle intéresse de manière directe ou indirecte toute la population. Malgré cette présence à la fois réelle et symbolique de l’agriculture dans le conscient et le subconscient de tous les algériens, il demeure que la perception de l’avenir de ce secteur est très fragmentée, les uns persistent à considérer que le statu du sol est déterminant pour l’investissement dans le secteur, les autres suggèrent que la propriété publique n’est plus adaptée aux transformations structurelles de l’agriculture. En réalité, la question foncière est déterminante et elle dépasse le seul volet de la propriété. Il faut préserver la propriété publique et lutter contre le démembrement sur toutes les terres agricoles, privée et publiques. L’enjeu est au niveau des usages de ces terres : quelles cultures, quels modèles d’exploitation, quels types de financement et de fiscalité, quels rôles pour l’Etat, etc.

Lorsque les principaux acteurs de l’activité agricole sont atomisés, et sont souvent dans une logique de face à face vis-à-vis de l’administration, le statut du sol ou celui de l’investisseur et de l’exploitant deviennent secondaires.  L’organisation de l’écosystème en place est celle héritée de la période de la révolution agraire : organismes de soutiens et de vulgarisation (Instituts de formation et de recherche, appuis techniques aux exploitants, coopératives…) système de subvention (péréquation des prix, régulation..) et institutions consulaires (chambres d’agriculture). A l’observation, nous remarquons que tous ces dispositifs sont devenus obsolètes et sans effets sur la production, le rendement et la modernisation de l’agriculture. Le système des coopératives dans l’agriculture n’existe plus, alors que c’est l’un des principaux instruments d’une politique agricole.

Une conférence sur la modernisation vient d’être organisée par le ministère de l’agriculture et plusieurs recommandations ont été formulées à travers les ateliers thématiques qui ont canalisé les débats.   A la lecture des conclusions des ateliers, on notera une tendance forte à poser les problèmes organiques et administratifs, c’est-à-dire l’éternelle rhétorique sur les relations entre les niveaux de responsabilités et la centralisation de la décision ; en d’autres termes les relations verticales. Pourtant les vraies questions relatives à la dynamique du secteur et ses acteurs sont d’essence horizontale. L’absence de ces relations et leur faible efficacité rendent le maillage du système agricole stérile. Ainsi les exploitants sont coupés des institutions de soutien, les instances de coordination et de régulation deviennent des coquilles vides. C’est la transformation de ce cadre institutionnel dans ses deux dimensions verticale (plus de décentralisation) et horizontale (plus de relations) qui peut rendre les écosystèmes plus dynamiques, plus réactifs, plus coopératifs et plus productifs avec des coûts de transactions moindres et des rendements plus grands. Cette transformation est celle de la gouvernance.  Cette dernière a fait l’objet d’un atelier à part entière. De nombreuses recommandations ont été formulées pour améliorer la gouvernance. Il serait opportun de mettre ces recommandations au débat public ; soit à travers les tribunes institutionnelles internes au secteur (ateliers régionaux, communications à destination des exploitants, des paysans, des techniciens des services agricoles….), soit dans le cadre d’un débat public ouvert à toutes les composantes de la société.   La gouvernance en milieu agricole et rural est d’une grande complexité et mérite d’être prise en charge au plan institutionnel et au plan opérationnel. La généralisation des coopératives sur tous les segments de l’activité agricole est une nécessité et constitue le cœur de la gouvernance.

L’agriculture saharienne n’a pas bénéficié d’un traitement à la hauteur de son importance dans la production nationale et dans l’investissement agricole. Pourtant ce segment de l’agriculture connait actuellement un développement prodigieux et les techniques culturales sont nouvelles alors que sa forte mécanisation est réelle et ses rendements attestés. Cependant, cette agriculture n’a pas que des avantages ; des effets négatifs sont déjà observables ici et ailleurs et il faut les prendre en considération.

En effet, cette nouvelle agriculture présente des caractéristiques spécifiques et des enjeux majeurs sur les plans économique (modèle de la firme et exploitation intensive des intrants industriels, défiscalisation, subventions) et écologique (usage excessif des ressources hydrique, introduction massive des produits chimiques).  La durabilité et la soutenabilité de cette agriculture doivent être observées à l’aune des considérations précédentes. La recherche d’un équilibre dans le cadre d’une gouvernance ouverte, responsable et inclusive est indispensable, aujourd’hui et pas demain.

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